Dávid Szabó

Les emprunts argotiques: analyse contrastive du procédé d’après un corpus d’argot hongrois[1]

 

1. Le rôle de l’emprunt dans les argots hongrois et français.

La place de l’emprunt parmi les procédés de la formation du vocabulaire argotique est ambiguë. Pierre Guiraud le cite parmi les procédés sémantiques qu’il regroupe sous l’appellation de substitutions de sens[2]. Un autre argotologue éminent, Albert Dauzat examine les emprunts indépendamment des catégories de changements de forme et de changements de sens[3]. Certains spécialistes hongrois, comme Géza Bárczi[4] ou Tamás Kis[5] considèrent également les emprunts aux langues étrangères, aux dialectes autochtones, etc., comme un mécanisme qui mérite d’être traité en dehors des catégories formelles et sémantiques.  Dans leur Rhétorique générale, Dubois et al. rangent l’emprunt parmi les métaplasmes, c’est à dire les figures qui agissent sur la morphologie[6]. Leur raisonnement est logique: dans le cas de l’emprunt, considéré comme un métaplasme par substitution complète, il n’y a en principe que commutation de forme, contrairement aux métasémèmes (figures sémantiques) dans le cas desquels le changement de forme s’accompagne d’un changement de sens[7]. Ainsi, l’emprunt est essentiellement différent, par exemple, de la métaphore, étant donné que lorsqu’on substitue un mot d’emprunt à un mot donné de la langue usuelle, cette substitution ne s’accompagne pas de glissement de sens. On prend un mot étranger ou dialectal ou archaïque pour remplacer un autre parce qu’on sait ou, au moins, on pense que le mot d’arrivée a plus ou moins la même signification que le mot de départ. Dans le cas des emprunts, en principe, on ne peut identifier aucun processus sémantique élaboré analogue à ceux mis en marche dans le cas de la métaphore ou de la métonymie.

Cependant, même si nous donnons raison à Dubois et al. pour ce qui est de l’opposition entre l’emprunt et les tropes, nous ne pensons pas que l’emprunt figure à juste titre parmi les métaplasmes, donc les procédés purement morphologiques. Contrairement à des mécanismes comme l’apocope ou l’aphérèse que la Rhétorique générale cite aussi parmi les métaplasmes, et qui n’impliquent en principe aucune démarche sémantique, l’emprunt, même s’il ne modifie en principe pas le sens du mot, ne peut pas se passer de la sémantique, dont il a besoin pour identifier l’élément lexical de l’autre langue, dialecte ou variété langagière qui puisse se substituer à un mot donné de la langue qui sert de cadre à l’argot en question. C’est pour cela que nous ne pouvons pas considérer l’emprunt comme un procédé purement morphologique et optons pour l’analyser en tant que procédé à part, source extérieure de la formation du vocabulaire de l’argot[8].

Les argotologues n’attribuent pas une importance égale à l’emprunt. Selon Bárczi, la richesse en emprunts est une caractéristique des argots en général[9]. Guiraud, quant à lui, précise que “les emprunts aux langues étrangères ont un très faible rendement cryptologique; l’argot n’emprunte pas”; il souligne par contre l’importance des emprunts aux dialectes indigènes[10]. Cette divergence de vues entre les deux éminents linguistes pourrait s’expliquer par l’évolution différente que connurent les argots hongrois et français. Néanmoins, Albert Dauzat, l’auteur d’un autre ouvrage fondamental sur l’argot français, accorde un rôle beaucoup plus important à l’emprunt en notant que les régions où se fait sentir l’influence de langues étrangères sont particulièrement propices à la formation des argots, étant donné que la connaissances de langues étrangères brise l’union qui attache le mot à l’idée tout en fournissant de nouveaux procédés d’altération et de nouvelles finales[11]. Nous pouvons supposer cependant qu’en ce qui concerne l’histoire, l’évolution des argots français, l’emprunt aux langues étrangères joua un rôle beaucoup moins important que dans le cas des argots hongrois. Cette remarque concerne essentiellement l’argot classique, c’est à dire celui de la pègre, et surtout l’époque de la formation des argots modernes, le XIXe siècle: c’est alors qu’en France comme en Hongrie, la pègre rompt son isolement social et perd le bénéfice de l’isolement linguistique[12]; c’est à la même époque qu’en Hongrie,  l’essor urbanistique commence à modifier définitivement une société auparavant essentiellement rurale, et que le centre des activités de la pègre se déplace dans la capitale qui restera majoritairement germanophone jusqu’à la fin du XIXe[13]. Ainsi, il n’est pas surprenant de constater la “démagyarisation” progressive de l’argot hongrois qui a lieu entre la fin du XVIIIe et la fin du XIXe siècle. Le document le plus connu de l’argot hongrois du XVIIIe siècle, la liste du notaire Jablonczay, datée de 1782,  qui est en réalité la copie d’une liste rédigée en 1776[14], comprend encore un vocabulaire globalement hongrois. Le lexique publié par Toronyai en 1862, tout en restant majoritairement magyar, témoigne déjà de la pénétration des éléments étrangers dans le langage de la pègre[15]. L’aboutissement du processus est bien illustré par les calculs de Jenő et Vető [16] selon lesquels 25 % des éléments contenus par leur dictionnaire d’argot hongrois publié en 1900 étaient d’origine hongroise, tandis que 33 % étaient d’origine allemande, 20 % d’origine hébraïque et 5 % d’origine tsigane.  Selon l’estimation de Bárczi, vers le début des années 1930, l’élément magyar ne constituait qu’environ 30-35 % du vocabulaire des argots hongrois, même si, parallèlement à la magyarisation progressive de Budapest, on constatait une nette augmentation du nombre des lexèmes d’origine hongroise[17]. Cependant, jusqu’à la chute de l’empire des Habsbourgs, les influences étrangères restèrent importantes.

Des faits relatifs à l’histoire de la Hongrie au XXe siècle nous incitent à formuler l’hypothèse selon laquelle le processus de la diminution de l’importance des éléments étrangers dans l’argot magyar, constaté dès 1900, dut s’accélérer à la fin des années 10, après la chute de l’empire autrichien plurilingue, et que la magyarisation du vocabulaire argotique qui s’ensuivit ne fut que renforcée par l’isolement du pays dû à la mise en place à la fois concrète et abstraite du rideau de fer à la fin des années 1940. Cette hypothèse est corroborée non seulement par l’estimation de Hoffmann[18] selon laquelle, vers le milieu des années 90, environ un tiers du vocabulaire du slang hongrois était d’origine étrangère, mais également par les calculs faits d’après notre corpus[19]: ici, environ 20-25 % du lexique sont d’origine étrangère. L’hésitation, en ce qui concerne le pourcentage exact, s’explique essentiellement par la difficulté de proposer des étymologies fiables pour certains mots, ce qui est loin d’être surprenant si l’on tient compte du retard considérable de l’argotologie hongroise dans le domaine des recherches étymologiques. Dans le cas de notre corpus, c’est surtout l’identification de nouveaux calques - issus essentiellement de l’allemand - qui pourrait éventuellement faire augmenter le nombre des éléments d’origine étrangère. En dehors du fait que le pourcentage des éléments étrangers peut varier en fonction de la dimension du corpus ou du type d’argot examiné, l’interprétation du phénomène d’emprunt argotique n’est pas la même chez tous les spécialistes. C’est à dire que, contrairement à Hoffmann, nous ne considérons pas comme emprunt du point de vue de l’argot les mots issus de la langue usuelle qui sert de cadre linguistique à l’argot donné, même s’ils sont des emprunts du point de vue de la langue (usuelle) en question. Ainsi, des mots de notre corpus comme admirális (littéralement “amiral”, mot international d’origine arabe) = “pénis”, son synonyme joystick (d’origine anglaise), ampulla (originellement “ampoule”, d’origine latine) = “bière” ou projekt (qui remonte en fin de compte à une origine française) = “celui/celle qu’on veut séduire”, bien qu’ils soient des emprunts du point de vue du hongrois, langue de base[20] de la variété argotique analysée, nous ne les considérons pas comme tels, étant donné que les mécanismes sémantiques de la formation du vocabulaire argotique agissent sur leur sens de la même façon que dans le cas de n’importe quel autre élément lexical du hongrois usuel. Nous considérerons donc par emprunt argotique uniquement les mots qui passent d’une langue étrangère directement dans l’argot. Cependant, même si l’on tient compte de ces critères plus stricts et de l’éventualité de l’augmentation du nombre des calques, il est évident que le pourcentage de l’élément étranger dans notre corpus pourrait difficilement dépasser les 30-35 % correspondant à l’estimation de Hoffmann.

Il faut rappeler ici que les chiffres donnés par Jenő et Vető et par Bárczi concernent essentiellement l’argot du milieu au sens strict et sous sa forme diluée dans la langue populaire (bien que l’analyse du dernier n’ignore pas les autres types d’argots non plus), alors que l’estimation de Hoffmann - qui s’intéresse surtout à la langue des jeunes - est valable pour un slang, autrement dit un argot commun, généralisé. C’est également dans cette catégorie que nous classons notre corpus, même si une partie du vocabulaire recueilli appartient sans aucun doute à des micro-argots cryptiques.

Nous avons par ailleurs toutes les raisons de supposer que les argots des étudiants ne se comportent pas de la même façon du point de vue de l’emprunt aux langues étrangères que l’argot de la pègre. Pour des raisons faciles à expliquer (d’une part, l’argot est un phénomène linguistique essentiellement oral, de l’autre, la police et les tribunaux commencèrent très tôt à s’intéresser aux mots secrets des malfaiteurs), les sources anciennes des argots enregistrent en général la terminologie particulière de la pègre. Ainsi, on comprend facilement que l’évolution des argots estudiantins soit beaucoup moins bien documentée que celle de l’argot du milieu. Mais on peut supposer que grâce aux voyages et à l’apprentissage de langues étrangères, les étudiants anciens empruntèrent davantage que les malfaiteurs moins exposés à des situations plurilingues. Par contre, la consultation du dictionnaire de Dobos, première source lexicographique importante de l’argot des étudiants hongrois[21], nous permet de constater qu’à la fin du XIXe siècle, cette variété langagière était moins pénétrée d’éléments étrangers que l’argot du milieu contemporain. C’est ici qu’il faut aussi attirer l’attention au rapport étroit qui lie les argots estudiantins à l’argot du milieu, le second étant une des principales sources du premier[22]. En ce qui concerne notre corpus, même s’il a été recueilli dans un milieu estudiantin, nous éviterons d’utiliser les termes d’argot des étudiants ou langue des jeunes, trop restrictifs et parfois déroutants, et continuerons à employer le terme d’argot commun[23].

Pour revenir au rôle de l’emprunt dans l’histoire des argots français, il faut admettre que Guiraud - même si nous sommes plutôt d’accord avec Dauzat - n’avait peut-être pas tout à fait tort en remettant en cause le rôle de l’emprunt aux langues étrangères parmi les procédés de la formation du vocabulaire de l’argot français. Il ne faut pas oublier que l’ouvrage fondamental de Guiraud sur l’argot date des années 50, et que d’un point de vue diachronique, l’emprunt aux langues étrangères fut sans nul doute moins important dans le contexte français que dans le cas de l’argot budapestois “cosmopolite” du XIXe siècle. Cependant, la France a beaucoup changé depuis les années 50. Dans l’introduction de son dictionnaire du français contemporain des cités, qui examine une variété particulière d’argot, Jean-Pierre Goudaillier accorde une place majeure à l’emprunt aux langues étrangères (à l’arabe, au tsigane, à l’anglo-américain et à des langues africaines)[24]. Si l’on tient compte de la situation sociolinguistique de la France contemporaine, de la cohabitation de jeunes Français, Beurs, Africains, etc. dans des cités situées en marge de la société française, on peut formuler l’hypothèse selon laquelle actuellement, dans les argots français, le phénomène de l’emprunt est en plein essor. Nous pouvons aussi supposer que - certes dans une moindre mesure et dans un contexte social différent - le nombre des emprunts en argot hongrois est également en augmentation depuis la réintégration du pays dans une communauté internationale plus ouverte et plus dynamique après la chute du communisme.

 

2. L’analyse des emprunts d’après le corpus hongrois

 

I. Naturellement, nous pouvons distinguer des catégories suivant la langue (ou variété langagière) de départ. Compte tenu du parcours historique commun, il n’est pas surprenant de constater que c’est l’allemand qui constitue la source la plus abondante de l’argot hongrois. Il faut noter cependant que l’allemand perdit son statut de source majeure de l’argot hongrois durant la première moitié du XXe siècle avec l’achèvement de la magyarisation de la capitale puis la chute de l’Autriche-Hongrie. Même si de nombreux éléments d’origine allemande persistent, de nos jours, l’allemand ou les argots allemands ne jouent plus un rôle important du point de vue de la formation des nouveaux éléments des argots hongrois. Parmi les emprunts à l’allemand, on peut faire la distinction entre des mots issus de la langue standard, des éléments d’origine dialectale et ceux provenant de l’argot allemand.

 

a. Eléments empruntés à l’allemand standard:

bláz “cigarette”  (< all. blasen = “souffler”); cajg/cájg “pénis” (< all. Zeug = “outil, outillage”); csálinger “garçon, serveur” (< all. Zahlkellner = “serveur qui perçoit l’addition”); dekkol “rester, demeurer qpart” (< arg. hgr. dekkol = “se cacher” < all. decken = “couvrir”); fölplankol “découvrir, dévoiler” (< prév. föl- “vers le haut” + all. planken = “recouvrir de lattes”); gangol “aller” (< all. Gang = “marche”); gláz “oeil” (< cf. all. Augenglas, Glas = “lunettes”; glasen = “regarder fixement”); háré/hári “cheveux” (< all. Haar = “cheveux”); májer “chouette, génial” (< arg. hgr. májer = proxénète < all. Meier = “paysan aisé”); steksz “argent” (< arg. hgr. steksz = “argent caché” < all. stecken = “cacher”); stíröl “regarder” (< all. stieren = “regarder fixement”).

 

b. Eléments issus de variétés dialectales de l’allemand:

elslisszol “filer” (< bavaro-autrichien schliß, geschlißen < schlaißen = “marcher lentement”); hantázik “mentir” (< all. régional hantieren = “faire du tapage”);  kóter “prison, internat, foyer universitaire” (< bavaro-autrichien kotter = “cage des aliénés”; all. régional kotter = “prison”); trécsel “causer” (< bavaro-autrichien trätschen = “papoter”)[25].

 

c. Eléments empruntés à l’argot allemand:

flepni “carte d’identité” (< arg. all. Fleppe = “carte, document”); punci “vulve” (< arg. all. punze = “vulve”); sitt “prison” (< arg. hgr. besittel = “capturer” < arg. all. verschütten = “arrêter”); spiné “femme” (< arg. hgr. spí = “propriétaire de café, de bistrot” < arg. all. spie = “tavernier”; ou < arg. all. Spinne = “prostituée”)[26].

 

d. De nombreux éléments étrangers, issus de diverses langues dont le français, sont passés dans l’argot hongrois par l’intermédiaire de l’allemand. Nous pouvons citer par exemple:

 

 bekrepál ”mourir” (< all. krepieren = “crever” < it. crepare, même sens); bulcsi “fête” (< arg. hgr. buli < all. régional boule < fr. poule “mise” = “le total des mises”); elcsakliz “voler” (< all. schachern = “faire du commerce, échanger” < hébr.  sahar = “faire du commerce en voyageant”); fájintos “très bien” (< all. fein = “fin” < fr. fin); kussol “se taire” (< all. kusch! = “tais-toi”, kuschen = “garder le silence, se tapir” < fr. couché!).

 

II. Autre source étrangère importante de l’argot hongrois du tournant des XIX-XXe siècles, l’hébreu et le yiddish cessèrent depuis longtemps d’enrichir les variétés langagières non conventionnelles magyares, mais les éléments d’origine hébraïque sont toujours nombreux. Leur importance dans la formation du vocabulaire du langage de la pègre hongroise au XIXe siècle s’explique non seulement par le nombre élevé de citadins juifs de langue allemande et yiddish, mais aussi par le fait que pour les germanophones, le yiddish mélangé d’hébreux constituait un langage secret potentiel[27], ce qui est tout à fait comparable au rôle du tsigane dans certains contextes linguistiques, notamment en Hongrie et - plus récemment - en France. Ainsi, il n’est pas surprenant de constater que les mots issus du yiddish ou de l’hébreu soient souvent arrivés dans le hongrois par l’intermédiaire de l’allemand ou, plutôt, le rotwelsch (par ex.,  elcsakliz). Quelques mots provenant du yiddish ou de l’hébreu:

 

haver “ami” (< yid. chawer = “ami, compagnon”); héderel “dormir qpart” (< arg. hgr. héderezik = “habiter, demeurer” < yid. Cheder = “chambre”); kajakos “fort” (< arg. hgr. kajak = “force” < yid. kajah = “force”); majré “peur” (< hébr. Mojre = “peur”); meló “travail” (< yid. melocho, melôche = “travail”);  siksze “femme” (< arg. hgr. siksza = “bonne, jeune juive” < hébr. Schikse = “jeune fille”; yid. Schekez “jeune fille”); szajré “butin; drogue” (< yid. s’chojro = “marchandise”); tré “nul, mauvais” (< yid. trefe = “impur”).[28]

 

III. Les dialectes tsiganes constituent une des sources étrangères les plus importantes de l’argot hongrois; comme nous avons vu plus haut, le tsigane, comme le yiddish, peut être considéré, du point de vue des argotiers (les utilisateurs des argots), comme une langue secrète potentielle. La pénétration des éléments tsiganes dans l’argot hongrois commence il y a plusieurs siècles.  Le langage de la pègre était riche en emprunts au tsigane déjà au milieu du siècle dernier. Le lexique publié par Toronyai en 1862 contient des mots également présents dans notre corpus comme gatso (gádzsó), kajál, kammel (kamázik, komál), lacsó (lácsó), minzsa (mindzsó) ou pia. Même si, selon les estimations citées par Bárczi, à la fin du XIXe siècle, le pourcentage des éléments tsiganes en argot hongrois était loin derrière celui des emprunts à l’allemand et au yiddish, de nos jours, le nombre des mots d’origine tsigane semble dépasser largement (et dépasse effectivement dans le cas précis de notre corpus) celui des éléments issus de l’hébreu et du yiddish. Il est important de rappeler ici que - contrairement à la perte de terrain progressive de l’allemand et à la disparition du yiddish - les communautés de langue tsigane ont continué de vivre parmi les Hongrois tout au long du XXe siècle. La plupart des équivalences tsiganes ont été identifiées soit à partir du dialecte sinto carpatique[29], soit à partir du dialecte lovári (lequel, d’après Rostás-Farkas et Karsai[30], pourrait constituer la base d’une langue standard tsigane de Hongrie). Il faut ajouter qu’il n’est pas exclu que certains mots d’origine tsigane soient arrivés dans l’argot hongrois par l’intermédiaire d’une autre langue: selon Béla Zolnai[31], par exemple, lóvé passa dans le vocabulaire argotique hongrois après avoir transité par le rotwelsch. Quelques mots d’origine tsigane de notre corpus:

 

baró “bien, bon” (cf. sinto bāro = “grand”);  biboldó “juif” (cf. sinto biboldo = “juif”); bula   “femme; vulve” (cf. sinto/lovári bul = “derrière”); csaj “fille” (cf. sinto chhaj = “lány”); csandázik “vomir” (cf. sinto chhandel = “vomir”); csávó “garçon” (cf. sinto chhāvo = “garçon”); csór “voler” (cf. sinto chōrel = “voler”); csóró “pauvre” (cf. sinto chorro = “pauvre”); dzsal “aller” (cf. sinto dzhal = “aller”); dzsuva “saleté” (cf. sinto dzhuv = “pou”); gádzsi “fille, femme” (cf.  sinto gādzhi =  “paysanne”); gádzsó “homme” (cf. sinto gādzho = “paysan”); gizda “prétentieux” (cf. sinto/lovári gizdavo = “fier”); kajál  “manger” ( cf.   tsigane d’Allemagne chhaiàwa = “je mangerai”; lovári xal = “il mange”; sinto hal = “il mange”); kúr “faire l’amour” (cf. lovári kurrel = “il fait l’amour”); lácsó “bien, bon” (cf.  sinto lāchho = “bon”); lóvé pénz  (cf. lovári pl. love, sinto pl. lōve = “argent”); manus(z) “homme” (cf. sinto/lovári manush, même sens); mindzsó “vulve” (cf. sinto minč  = “vulve”, cf. aussi mizs); mizs “vulve” (cf. lovári mizh = “vulve”); péló “pénis” (cf. sinto/lovári pēlo = “testicule”); piás “alcoolique” (< arg. hgr. piál = “boire” < cf. sinto/lovári  pijel = “il boit”); verda “voiture” (< sinto verda = “voiture”).

 

Un lien particulièrement intéressant entre les argots hongrois et français est constitué par un certain nombre d’éléments lexicaux d’origine tsigane qu’on retrouve, parfois avec une signification légèrement modifiée, dans les variétés argotiques des deux communautés linguistiques. Pourtant, Dauzat - dans son ouvrage paru pour la première fois en 1929 - constate que les éléments tsiganes sont quasi inexistants en argot français[32]. L’importance sociolinguistique de la communauté tsigane en France semble avoir changé considérablement depuis les années 20. Dans l’introduction du dictionnaire de français des cités de Goudaillier, paru en 1997, les emprunts au tsigane occupent une place de choix[33]. D’après notre corpus d’argot commun hongrois, nous avons pu identifier les éléments (hungaro-franco-tsiganes) communs suivants:

 

fr. boule “postérieur, cul” < dialecte kalderash bul, même sens (cf. hgr. bula); fr. chourav “dérober, voler” < romani čorav “je vole” (cf. hgr. csór); fr. craillav “manger” < sinto xajav “je mange” (cf. hgr. kajál); fr. gadji “fille, femme” < romani gadFi “femme mariée non Tsigane (cf. hgr. gádzsi); fr. gadjo “gars, homme” < romani  gadFo “homme marié non Tsigane (cf. hgr. gádzsó); fr. lové(s) “argent” < romani lovo, pl. lové “argent (cf. hgr. lóvé); fr. manouche “Tsigane, langue tsigane” < tsigane manus “homme” (cf. hgr. manus, manusz); fr. mettre les adjas “partir rapidement” < romani dja “va!” (cf. hgr. dzsal); fr. minch “copine” < sinto minč “vulve, femme” (cf. hgr. mindzsó et mizs); fr. pélo “pénis, homme” < romani pelo “testicule”, sinto pelo “sexe de l’homme, d’où homme” (cf. hgr. péló); fr. pillave “boire” < romani piav “boire” (cf. hgr. piás)[34].

 

Dans le cas de certains éléments d’origine tsigane, le hongrois semble avoir atteint un sens plus large, plus générique que le français, plus fidèle au sens originel tsigane, ce qui n’a rien de surprenant vu la chronologie du passage des éléments tsiganes dans le hongrois. On peut citer par exemple les cas de boule-bula et de manouche-manus. Cependant, la plupart subirent le même type de généralisation de sens dans les deux langues: par exemple, gādzho signifie un individu non tsigane dans les dialectes tsiganes, alors que ses équivalents hongrois et français réfèrent simplement à un homme, peu importe ses origines ethniques. On peut constater cependant que - contrairement à la majeure partie des emprunts au tsigane du français - un grand nombre d’éléments tsiganes du hongrois se sont considérablement vulgarisés durant leur long séjour en argot hongrois et sont passés dans l’argot commun voire dans la langue familière. Parmi les éléments tsiganes de notre corpus hongrois, csaj, csávó, csór, csóró, duma, dilinós, góré, kajál, lóvé, manusz, piás, séró, vaker et verda figurent, la plupart avec la mention szleng, dans un dictionnaire de synonymes d’usage général, le Magyar szókincstár, alors que chourav(er) et manouche sont les seuls d’entre nos exemples français à être admis dans Le Nouveau Petit Robert. L’ancrage plus profond dans le hongrois des mots issus du tsigane peut être également illustré par les longues séries de synonymes obtenus par substitution de forme qui sont construites à partir de certains emprunts au tsigane. Ainsi, csaj donne, par exemple, csajbinkó, csajci, csajka, csajóca, csajszi, csajszli ou csajvadék.

 

IV. L’anglais constitue une source particulièrement importante et dynamique des argots hongrois contemporains. Par dynamique nous entendons que la majorité sont des emprunts récents, et que contrairement, par exemple, au yiddish, source tarie depuis un certain temps, et à l’allemand dont l’importance a considérablement diminué, l’influence anglo-américaine est, paraît-il, à son apogée. Alors que la plupart des éléments allemands, hébraïques et tsiganes sont documentés en argot hongrois depuis des dizaines d’années voire depuis plus d’un siècle (cf. les mots tsiganes cités par Toronyai en 1862 ou l’analyse des éléments allemands et hébraïques par Bárczi dans les années 30[35]), la majeur partie des emprunts à l’anglais ne figurent pas encore dans les dictionnaires d’argot hongrois publiés au début des années 1990[36]. Les raisons de cet accroissement de l’importance de l’anglais sont essentiellement les mêmes qu’en France: l’omniprésence de l’anglo-américain en tant que langue internationale par excellence dans de nombreux segments de la vie quotidienne par l’intermédiaire de la musique (rock, rap, etc.), du cinéma, de la publicité; l’apprentissage de l’anglais à l’école; l’influence, l’attrait des cultures alternatives anglo-américaines telles le hip-hop ou la “drug culture”, etc. Il faut noter cependant que - à la différence de la France - l’ouverture politico-économique de la Hongrie à la fin des années 80 a considérablement accéléré le processus d’anglicisation dans le cas des argots hongrois. Parmi les emprunts à l’anglais, nous pouvons faire la distinction entre les éléments issus de l’anglais standard et ceux provenant du slang.

 

a. Eléments issus de l’anglais standard:

 

bizniszel “faire des affaires”  (< angl. business = “affaires”); bossz “patron” (< angl. boss = “patron”); okés “bien” (< angl. O.K.); cséndzsel  “changer  de l’argent (au noir)” (< angl. to change “changer”); lúzer “individu maladroit, malchanceux” (< angl. loser, même sens); filinges “bien, agréable, où il y a de l’ambiance” (< angl. feeling = “sentiment”); görl “fille” (< angl. girl = “fille”); kes “argent (liquide)” (< angl. cash = “argent liquide”); lájt(os) “faible, pas assez” (< angl. light = “léger”); mani “argent” (< angl. money, même sens); rulez “très bien, très bon” (< angl. rules < to rule = régner”); sopingol “faire des courses” (< angl. shopping = “courses”); topon van “être en pleine forme” (< angl. top = “sommet”).

 

b. Anglicismes issus du slang ou de la langue familière:

 

báj!  “au revoir, salut” (< angl.fam. bye, même sens); bébi “chérie” (< angl. fam. baby = “chérie”);  kúl “bien, cool” (< slang cool = “détendu, bien”); dzsoint “cigarette de haschisch ou de marijuana” (< slang joint, même sens); dzsánki   “drogué” (< slang junkie = “individu dépendant d’une drogue dure”);  fles “expérience positive; bien” (< slang flash = “flash, brusque éblouissement sous l’effet de la drogue”); gandzsa “drogue douce” (< slang ganja = “marijuana”); sit “shit, haschisch” (< slang shit, même sens); szpíd “amphétamine” (< slang speed, même sens); sztondul “être sous l’effet d’une drogue; être fatigué” (< slang to be stoned  = “être sous l’effet d’une drogue”).[37] 

 

Il ne faut pas oublier d’ajouter ici que les emprunts à l’anglais constituent également un lien entre les argots hongrois et français. Nous pouvons citer par exemple les anglicismes communs suivants:

 

fr. business “trafic, affaires” (cf. hgr. bizniszel); fr. boss “chef (de bande)” (cf. bossz); fr. cool “calme, détendu” (cf. kúl); fr. loser “homme malchanceux” (cf. lúzer); fr. flash “brusque éblouissement sous l’effet de la drogue” (cf. fles); fr. joint “cigarette de haschisch” (cf. dzsoint); fr. junkie “individu dépendant de la drogue” (cf.  dzsánki); fr. shit “haschisch, drogue” (cf. sit); fr. speed “amphétamine” (cf. szpíd); fr. stoned “être sous l’effet violent de la drogue” (cf. sztondul)[38].

 

V. Finalement, on peut distinguer une catégorie résiduelle comprenant des mots empruntés à diverses langues:

 

bratyizik “se faire des amis” (< slovaque brat = “ami”); csá “salut” (< it. ciao, même sens); gálává “tête”  (< cf.  russe  голова, même sens); ipse “homme” (< lat. ipse = “lui-même”); krapek “homme” (< slovaque chlapec = “garçon”); tropára megy “se détériorer” (< cf. it. troppo, fr.trop + hongrois megy = “aller”); zsebzsötem “masturbation”(< hongrois zseb = “poche” + fr. je t’aime); zsuga “argent; jeu” (< arg. hgr. zsuga = “jeu de cartes” < zsugál = “jouer aux cartes” < roum. a juca = “il joue”).

 

Outre la classification des emprunts selon leurs origines, on peut également les répartir suivant le niveau de leur pénétration dans la langue magyare. Nous avons mentionné plus haut que nous ne considérions pas comme emprunts argotiques les mots certes d’origine étrangère, mais qui arrivèrent dans le vocabulaire de l’argot commun par l’intermédiaire de la langue usuelle. Ainsi, albínó (“qu de très blond”), d’origine portugaise, bomba- (“très”), d’origine gréco-latine, ou király (“très bien”), d’origine slave, ne sont pas traités comme des emprunts argotiques, étant donné qu’ici, les mots de départ sont des mots courants de la langue usuelle, et que du point de vue du glissement qui modifie leur sens, ils ne se comportent pas différemments des autres mots usuels. Nous ne considérons pas comme emprunts non plus les “éternels” mots tabous du hongrois, c’est à dire les anciens emprunts vulgaires comme baszik “baiser” (< turc), kurva “putain” (< slave) ou picsa “vulve” (< slave), qui sont attestés en hongrois depuis très longtemps (baszik: 1422; kurva: 1592; picsa: 1405), mais qui continuent à avoir une coloration fortement vulgaire, et sont ainsi souvent rangés du côté des argots. Cependant, argot et vulgarité sont deux catégories distinctes. Il nous semblerait donc plus juste d’interpréter les mots de ce type comme des emprunts non pas de l’argot hongrois, mais de la langue hongroise tout court.

 

Les emprunts argotiques proprement dits peuvent être divisés, selon notre hypothèse, en trois grandes catégories. La première serait celle des emprunts récents ou “actifs”, c’est à dire des mots d’origine étrangère qui peuvent être considérés comme emprunts d’un point de vue synchronique. Même si, pour la plupart, les mots en question n’ont sans doute pas été empruntés directement par nos enquêtés, ils auraient pu l’être pour des raisons chronologiques et sociolinguistiques (notamment la connaissance de langues, de civilisations étrangères susceptibles de fournir des éléments lexicaux nouveaux). Nous pouvons ranger dans cette catégorie des anglicismes documentés nulle part en dehors de notre corpus comme rulez, ceux qui sembleraient être d’un usage relativement courant de nos jours mais ne figurent pas encore dans les dictionnaires comme kúl ou sit, ainsi que des emprunts à l’anglo-américain qui ne figurent pas encore dans les  dictionnaires d’argot antérieurs au début des années 90: par exemple, dzsoint, fles ou szpíd. A part la majeure partie des emprunts à l’anglais de notre corpus, on pourrait citer ici des emprunts à l’allemand comme gezelsaft “groupe d’amis” (cf. all. Gesellschaft) ou kopf “tête” (cf. all. Kopf), ainsi que gálává, d’origine russe, étant donné que ces mots ne sont pas attestés en dehors de notre corpus.

Le deuxième groupe, bien plus nombreux que le précédent, est constitué d’éléments d’origine étrangère bien attestés par l’argotologie hongroise. Ce sont des mots qui ne sont pas des emprunts aux langues étrangères du point de vue de l’argot commun contemporain des étudiants budapestois. Il serait plus juste de parler d’emprunts interargotiques, vu que les éléments de ce groupe figurent dans le vocabulaire des argots hongrois depuis très longtemps. C’est à dire que l’argot des étudiants emprunte des mots comme hesszel (“faire attention”) ou markecol (“dépouiller”) non pas directement au yiddish, mais à l’argot de la pègre hongroise, et souvent par l’intermédiaire d’autres variétés argotiques. Tous les emprunts au yiddish et à l’hébreu, ainsi que la grande majorité des emprunts à l’allemand et au tsigane, appartiennent à cette catégorie.

Nous pouvons également distinguer un troisième groupe d’emprunts particulièrement bien intégrés au hongrois. Ici, il ne s’agit pas simplement de l’adaptation phonétique et catégorielle qu’on peut observer dans le cas des exemples cités ci-dessus. Il s’agit notamment de séries synonymiques obtenues par substitution de forme à partir d’un emprunt. Un élément tsigane comme csávó donne par exemple csákó (littéralement “shako”) par attirance homonymique. Hapsi (“homme”), obtenu très probablement par altération de l’élément d’origine yiddish haver, donne hapek, hapsi, hapó et hapók. Même si ces mots sont d’origine étrangère, il ne s’agit plus d’emprunt au sens propre du mot, étant donné que la déformation s’opère à partir d’un élément enraciné dans le hongrois. Un autre type de cette troisième catégorie est constitué de compositions et de locutions d’origine mixte, hongroise et étrangère. Nous pouvons citer en exemple beszmokamikizik “être sous l’effet d’une drogue” (mot-valise construit à partir de l’angl. to smoke “fumer” et le nom propre hongrois Móka Miki avec l’adjonction d’un préverbe et d’une désinence verbale hongrois), zsebzsötem (hongrois zseb + fr. je t’aime) ou l’expression gajra megy “se détériorer” (yiddish gai “enfer” avec suffixation hongroise + le verbe hongrois megy “aller”). Les calques qu’on peut considérer comme une sorte d’emprunt présentent des analogies indiscutables avec cette catégorie. Nous pouvons citer par exemple gyökér (littéralement “racine”, en argot “stupide, mauvais”, qui serait le calque de l’arg. all. Wurzen)[39], fű, gyep (“herbe, gazon” = “marijuana”; cf. slang. grass), gyors (“rapide”) et spuri (arg. hgr. “vite!”; cf. slang speed) ou zöldhasú (<ventre-vert> = “argent”; cf. slang greenbacks = “dollar”).

 

3. Conclusion.

Notre étude s’est limitée à l’analyse de l’emprunt à des langues étrangères dans un corpus d’argot commun hongrois. Il ne nous était pas donné d’examiner ici les phénomènes de l’emprunt aux dialectes indigènes ou aux autres variétés non conventionnelles (argot des malfaiteurs, jargons, etc.) qui sont tout aussi dignes de l’attention des linguistes. Le problème particulièrement délicat des calques mérite également d’être analysé plus en détail.

Nous espérons cependant que la présentation des principales catégories d’emprunts en argot magyar a permis de mettre en valeur certaines analogies entre les variétés argotiques hongroises et françaises et d’attirer l’attention sur des sources communes (le tsigane et l’anglais) qui constituent un lien entre les argots des deux communautés linguistiques.

 

 

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[1] In: Revue d’Etudes Françaises, Budapest, n° 6 – 2001, 147-159. o.

[2] GUIRAUD 1956, pp. 63-66.

[3] DAUZAT 1956, pp. 60-85.

[4] BÁRCZI  1980, pp. 254-267.

[5] Cf. KIS 1992, pp. 361-363.

[6] DUBOIS ET AL.1970, pp. 49.

[7] DUBOIS ET AL.1970, pp. 93.

[8] Cf. KIS 1992, p. 361.

[9] BÁRCZI 1980, p. 254.

[10] GUIRAUD 1956, pp. 63-64.

[11] DAUZAT 1956, pp. 16 et 18.

[12] GUIRAUD 1956, p. 15.

[13] Cf. BÁRCZI 1980, p. 255.

[14] KIS 1997, pp. 280-281.

[15] A rablóknak, tolvajoknak és kozákoknak együttvaló hamis és zavaros beszédeik, hasonlóan hamis és titkos cselekedeteik felfedezéséül összeiratott és kiadattatott a köznépek ovakodási hasznára, és a rossz emberektôl való ôrizkedéseikre TORONYAI KÁROLY által Békés Csabán, Pest, 1862.

[16] Cf. BÁRCZI 1980, p. 254.

[17] Cf. BÁRCZI 1980, p. 255.

[18] Cf. HOFFMANN 1996, p. 243.

[19] Corpus d’argot commun hongrois (environ 2300 mots et expressions) recueilli en 2000 dans un milieu estudiantin budapestois.

[20] Cf. KIS 1997, p. 242.

[21] DOBOS 1898.

[22] Cf. BÁRCZI 1980, p. 244.

[23] Cf. FRANCOIS-GEIGER 1989, p. 27.

[24] GOUDAILLIER 1997, pp. 18-21.

[25] L’origine onomatopéique de trécsel ne peut pas être exclue non plus.

[26] Pour les étymologies des éléments issus de l’allemand régional ou argotique, nous nous sommes appuyé sur BENKŐ 1967-1976, ZOLNAY - GEDÉNYI 1945-1962 et FAZAKAS 1991.

[27]  BÁRCZI 1980, pp. 256-257.

[28] Pour les étymologies des mots d’origine hébraïque, nous avons consulté essentiellement BENKŐ 1967-1976 et ZOLNAY - GEDÉNYI 1945-1962.

[29] Cf. ROMANO RÁCZ 1994.

[30] ROSTÁS-FARKAS - KARSAI 1991.

[31]  Cf. ZOLNAI sans date.

[32] DAUZAT 1956, p. 85.

[33] GOUDAILLIER 1997, p. 19-20.

[34] Les définitions et étymologies citées proviennent de GOUDAILLIER 1997, à l’exception de celles de manouche et mettre les adjas, empruntées à COLIN - MEVEL 1990.

[35] Cf. BÁRCZI 1980.

[36] BOROSS - SZŰTS 1990;  FAZAKAS 1991.

[37] Même si, dans notre corpus, les anglicismes récents étaient écrits parfois à l’anglaise, parfois à la hongroise, nous avons opté pour la systématisation des formes selon l’orthographe hongroise.

[38] Les exemples français proviennent de GOUDAILLIER 1997 et COLIN - MEVEL 1990.

[39] Cf. BÁRCZI 1980, p. 264.